Gorak Shep au pied du Kala Pattar

Himalaya du Népal

La Pyramide

Un peu après Lobuche, dans une vallée transversale à l'ouest du sentier principal, une station de recherche en forme de pyramide est accessible par un court sentier. En cas d'urgence, il y est possible de communiquer avec Namche Bazar et même d'y recevoir de l'aide en attendant les secours.

Glacier du Khangri

La traversée du glacier du Khangri ne pose pas de difficulté. Comme le glacier avance, le sentier se déplace petit à petit vers l'est et est remplacé régulièrement par une nouvelle piste tracée par les porteurs, les caravanes de yacks et les randonneurs. La piste, très fréquentée durant les saisons de trekking, est facile à repérer.

Zone glaciaire Khangri-Khumbu

Excursions

Il est presqu'impossible de visiter le camp de base et de faire l'ascension du Kala Pattar la même journée. À moins d'avoir du temps devant soi, ce qui n'est pas le cas de tous, les trekkeurs choisissent l'une ou l'autre des excursions. Ils arrivent tôt à Gorak Shep, se rendent au camp de base ou au Kala Pattar en après-midi et retourne dormir à Lobuche.

Si l'on envisage se rendre au camp de base et grimper le Kala Pattar, il faut également arriver tôt à Gorak Shep, faire l'une des deux excursions en après-midi et dormir à Gorak Shep à 5 140 mètres d'altitude. Les lodges offrent des places en dortoir. Quelques chambres sont aussi disponibles. On peut évidemment y faire du camping. Dormir à Gorak Shep nécessite toutefois d'être très bien acclimaté. Si des étapes d'acclimatation ont été sautées durant la montée, il est contre-indiqué de dormir à Gorak Shep.

Le lendemain matin est consacré à la deuxième excursion. On dispose alors de l'après-midi pour rejoindre Lobuche afin d'y passer la nuit. Pousser la marche jusqu'à Pheriche est possible mais c'est une longue journée.

Piste du camp de base

Camp de base

Le sommet de l'Everest n'est pas visible du camp de base. Selon ce qu'on peut lire, le sentier serait facile à suivre parce qu'il est très fréquenté durant la saison des expéditions alpines, entre la fin mars et la mi mai. Comme nous avons pu le constater nous-mêmes, la piste sur le glacier n'est pas toujours aussi évidente hors saison, surtout lorsqu'il a neigé. Le glacier peut aussi être crevassé. D'où l'importance de bien évaluer les risques afin que l'aventure ne se transforme pas en tragédie.

Etape Lobuche-Gorak Shep
Durée : environ 3 à 4 heures
Dénivelés : + 230 m / - négligeable
Gîte et repas : Lobuche
Poste de secours : La Pyramide

Etape Gorak Shep-Everest BC
Durée : entre 4 à 6 heures (aller-retour)
Dénivelés : + 200 m / - 200 m

Variation d'altitude
Lobuche	4 930 mètres
Gorak Shep	5 160 mètres
Camp de base (EBC)	5 364 mètres
Gorak Shep	5 160 mètres

Carte-itinéraire
Lobuche - Gorak Shep

Sortir du duvet ce matin m’est pénible. M’habiller l’est encore davantage. Je gèle. Les pieds et les mains surtout. L’image de la longue table dressée sur la butte face au Nuptse me plonge dans un monde surréaliste. Revêtu de plusieurs couches de vêtements, bonnet sur les oreilles et moufles aux mains, je mange mon porridge en grelottant et en tapant des pieds. Le Nuptse est tellement haut que le soleil lui-même doit mener un long combat pour arriver à rejoindre de ses rayons la vallée que la montagne garde dans son ombre. Mettons-nous en route au plus vite.

Moraines et glaciers

Je me réchauffe en marchant. Les muscles retrouvent leur souplesse, la respiration est courte mais régulière, le rythme est bon. Jour après jour, je me suis transformé en machine à marcher. Nous sommes dispersés sur la piste car, la montée étant assez graduelle, les plus jeunes se sont transformés en machines de course.

Depuis Lobuche, situé sur la piste du camp de base de l'Everest au Népal, vue sur la zone morainique désertique laissée par le recul du glacier du Khumbu. Ce glacier aurait reculé d' environ 5 km au cours des 50 dernières années.

Le sentier longe la rive du glacier du Khumbu. Le retrait du glacier y est parfaitement visible à la hauteur de Lobuche. Plus loin, il faut gravir les moraines glaciaires pentues et accidentées qui se sont formées à sa jonction avec les glaciers Khangri Shar et Khangri Nup. Une montée difficile de 150 mètres. La piste franchit les glaciers du Khangri recouverts de débris rocheux. En avant, se détache le Pumori (7 161 m) facilement reconnaissable à sa forme en cône. Une courte descente nous conduit à Gorak Shep, la dernière kharka de la vallée : quelques lodges, un petit lac gelé, quelques cabanes de bergers en piteux état et des tentes dont les nôtres.

Le camp de base

Après le déjeuner, nous partons pour le camp de base. Quelques coéquipiers et coéquipières ont choisi de demeurer au camp. Des monuments funéraires à la mémoire d'alpinistes morts sur l'Everest ont été érigés le long du sentier. Plus loin, le sentier surplombe une ravin à l'est qui nous sépare de la gigantesque muraille du Nuptse, un mur de roc, de neige et de glace presque vertical qui nous dépasse de plus de 2 500 mètres. Nous nous arrêtons pour la pause. Pascal et Antoine relatent la saga de la conquête de l’Everest. Le vent souffle fort. Pour peu, on croirait l’entendre siffler l’histoire dramatique de ces hommes et de ces femmes qui ont payé de leur vie leur quête du plus haut sommet du monde.

Assailli par nos questions, Babu Chhiri Sherpa, assi sur le socle d'un monument funéraire érigé devant le majestueux Nuptse, raconte ses ascensions sur l’Everest et la longue nuit qu’il y passa le 6 mai 1999 : la traversée du Khumbu Icefall, la plus monstrueuse chute de séracs au monde ; l’établissement des camps sur l’itinéraire conduisant au sommet ; la longue veille sans sommeil au sommet de l’Everest ; le plus long séjour d'un homme dans la death zone, là où l'acclimatation n'est plus possible, où le temps ne peut plus rien, où la vie est en sursis.

Car c'est bien de cela dont il s'agit. Malgré tous les exploits réalisés sur les plus hauts sommets, ces montagnes n'ont jamais été véritablement vaincues. Les hommes ne sont jamais parvenus à les domestiquer, à y faire pousser quoi que ce soit, à y vivre. Tout ce qui nous entoure témoigne de la puissance des forces qui ont propulsé ces montagnes vers le ciel. Lentement, inlassablement, ces forces poursuivent leur œuvre à travers le temps qui perd ici toute signification, comme s'il était retenu prisonnier par ces sommets gigantesques qui ont impérieusement besoin de lui pour poursuivre leur ascension. Se déplacer dans cette immensité, c’est comme poser les pieds avec retenue sur une frange d’éternité. Il n’est donc pas étonnant que les peuples d’ici conçoivent le sommet des montagnes comme la demeure des dieux.

On y était presque

La montagne invaincue et toute puissante n'est pas une simple vue de l'esprit. La progression est de plus en plus difficile. En raison des récentes chutes de neige, il n'y a plus aucune piste sur le glacier. La neige qui s'y est accumulée peut dissimuler de profondes crevasses. Des gouffres prêts à nous avaler et à nous broyer. Nous n'avons ni l'équipement ni la formation nécessaires pour nous aventurer plus loin sur le glacier dans ces conditions. Dans ce monde de titans, nous sommes complètement à la merci de la montagne. Elle ne nous est pas favorable aujourd'hui. Il faut rebrousser chemin. Déception certes mais relative ! La fatigue assurément. Puis le sommet de l'Everest n'est pas visible du camp de base. Le retour à Gorak Shep s'effectue à bons pas. Les images se succèdent dans ma tête, comme un film au ralenti, tandis que mes jambes lourdes avancent péniblement dans cette trace enneigée qui nous conduit au camp.

Nous passons la nuit à Gorak Shep. Dormir à près de 5 200 mètres d’altitude n’est pas de tout repos. Je me réveille à quelques reprises. Comme hier, je manque d'air. Je dézippe mon duvet et tente de respirer profondément. Comme hier, la machine à respirer cherche à s’emballer au moindre effort, au moindre mouvement. Assis dans le noir, jambes repliées, corps bien droit, yeux fermés, je me dis que si le fakir peut s'asseoir sur des clous, je peux certainement arriver à gober quelques unes des bulles d'oxygène éparses qui flottent dans l'air mince de Gorak Shep. Toutes les ruses sont bonnes si elles s’avèrent efficaces. L’important c’est d’arriver à arracher à la nuit quelques moments de sommeil qui me permettront de franchir la prochaine étape. L’étau se relâche.